Il existe des associations pour enfants en détresse, on ne peut obliger à rien un vieux qui s'enferme refusant toute aide.
Je me suis abimée dans l'agonie de ma mère. Je me suis enlisée dans le regard de ma soeur Suzy en décomposition ces jours de canicule où personne ne venait nous l'enlever. J'étouffe d'une tendresse inavouée pour un ex qui n'est plus en mesure de la recevoir. Comment faire son deuil d'un mort vivant?
Un front taché de plaques brunes, une peau aspirée par la maigreur, la voix à peine audible et sans réponse à des questions pratiques. Je n'ai pù m'empêcher d'embrasser cet homme que je ne reconnaissais pas, sa main, son cou, sa bouche. Il ne savait me dire que: "Je vais mal! en pleurant doucement comme un enfant qui a peur d'être battu s'il manifestait plus. Il était sur le pas de sa porte:" il y a quelqu'un déjà!- Est-ce que je peux faire quelque chose, appeler vos amis? - Non! Non! Il y a quelqu'un déjà! -Votre femme? -Oui! Vous êtes toujours belle!" Cette phrase à peine murmurée, plusieurs fois me laissait croire qu'il m'avait reconnue (mémoire ancienne).
Une spy rencontrée dans la rue: Je ne le verrais plus? -Non!
Ce Non! catégorique est tombé comme un couperet, je ne voulais pas y laisser ma tête. Je suis descendue à la station de métro et j'ai téléphoné. "Je suis en bas de votre immeuble!-Montez!" Ne pas affoler cet homme que je n'ai pas vu depuis presque trois ans. Il m'ouvre, je me crois dans un film de science-fiction, l'horreur d'un personnage qui a prit vingt-ans d'un coup, et qui se tient hébété et flageolant dans l'embrasure de sa porte,Il me fait penser à Edmond Dantès sorti de son cachot dans le Comte de Monte-Christo. Nous restons sur le palier, il ne répondra à rien, ni au nom de son médecin, des amis à joindre, du traitement qu'il subit, de quel mal il souffre, rien que son gémissement: Je vais si mal!
De crainte que son épouse ne remonte, et pour le pas l'inquiéter, je suis redescendue par l'escalier: Rentrez et fermez votre porte! Le malade n'en faisait rien me regardant fixement, je ne savais si c'était un regard d'adieu où d'un appel au secours. Le cauchemar entre en moi comme une bête ignoble, je ne peux me résoudre à rester passive, j'appelle le seul ami qui avait ses entrées: Je ne l'ai pas revu depuis avant les vacances, il faut que je retrouve du courage, il me déprime tant! J'avais imaginé pour le rebooster que quelqu'un le filme pour le forcer à sortir de son antre, c'est trop tard, à part photographier un extra- terrestre d'outre tombe si l'on veut du morbide.
je n'ai rien à me mettre sous la dent depuis des décénies. Un jour quelqu'un me dira Tu as vu dans le journal? C'est d'ailleurs ce qu'il m'avait répondu: "Comment je saurais si vous êtes mort? -Vous l'apprendrez par le journal!"
Je pourrais intituler ce texte: Chronique d'un pourrissement avancé.
Il me faut trouver une autre filière pour des renseignements exacts. Je ne me résous pas au deuil tant qu'il y a vie. Ma douleur c'est l'impuissance face au mal des autres.
lundi, octobre 02, 2006
Inscription à :
Publier les commentaires (Atom)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire