jeudi, juillet 01, 2010

nabe-sternberg

Marc-Edouard Nabe : Nabe’s dream, journal intime 1 - juin 1983 à février 1985, Editions du Rocher, 1991



- Vendredi 4 mai 1984 (page 405)
J’écoute une interview de Jacques Sternberg avec une lecture d’un texte autobiographique assez amusant. Sternberg est un typique auteur raté et complaisamment vautré dans son échec, faux artiste complexé... ! Pourtant bien des choses qui passent agréablement dans son intervention radiophonique auraient pu nous rapprocher : le mépris des éditeurs et des écrivains, l’idolâtrie de Lester Young, l’amour du dessin humoristique, Siné, Gébé, l’antiscolarité, l’anti-intellectualisme, la polémique, Monk, Parker, l’horreur des voyages, la difficulté à publier...
Hélas, trop d’”insolite”, d’”humour”, de “fantastique, de “B.D.” et de “sport” pour moi. Quelques bonnes phrases balancées dans le Magazine littéraire ne suffisent pas à sauver quarante livres ratés, hors tradition, sans violence ni gaieté, sans force cosmique, épique ni tragique...


- Lundi 7 mai 1984 (page 410)
En attendant Sollers, je compulse [...] le compte rendu de la soirée du 1er mars dont j’ai déchiré l’invitation. A tort bien sûr quand je lis la liste des présents. Sous l’égide du tortionnaire Bourgadier, qui sourit très sympathiquement sur une photo, tout un essaim de tout-parisiens dont Sternberg, Sempé, Guégan et même Ingrid Caven et Jean-Jacques Schuhl !... “Dieu” (ou ce qu’il en reste) tient vraiment à ce que nous nous rations toute notre vie. Pas de balle perdue pour le hasard !...


- Lundi 21 mai 1984 (page 436)
Stéphane me ramène le manuscrit de Bloc neigeux (première tentative de publication en 1981) que j’avais confié un peu imprudemment à sa mère qui l’avait perdu. Des dix exemplaires de ce “roman” diffusé dans tout Paris, deux restent encore à récupérer : celui de Denis Roche (passé par Sollers) et celui de Jacques Sternberg. J’ai horreur de laisser traîner des textes à l’extérieur.


- Mercredi 13 juin 1984 (page 476)
[à la rédaction de Vertiges, avec Eugène Simion]
Je remarque un article sur Lebovici qui n’a pas l’air piqué des vers. Le journal est truffé de dessins de Bob décidément remis à la charrue d’enthousiasme. Une telle production fait plaisir à voir. Il y a également punaisée au mur une liste de noms avec des indications correspondantes : oui, non, peut-être, oui, non, non... Topor, Delfeil de Ton, Wolinski, etc. La fine meute ! A Sternberg, je lis : NON... Le deuxième numéro de la revue s’annonce très méchant.


- Mardi 11 décembre 1984 (page 748)
[soirée du mardi à la rédaction de Hara-Kiri]
Un autre connard à qui nous avons affaire ce soir, c’est Jacques Sternberg. Je ne risquais pas de le louper, ce sinistre raté ! En 1981, je lui avais fait parvenir Bloc Neigeux. Ne m’ayant jamais répondu, je lui ai envoyé une lettre d’insulte marrante. Je croyais que ce “maître de l’humour noir” apprécierait cette façon de me présenter à lui. Au contraire, il fait l’indifférent fermé, assurant qu’il n’a rien reçu. Plus tard j’essaie de lui faire serrer la main de Marcel, en tant que lestérien, jazzfan, etc. Ostensiblement, il fait exprès de tourner la tête pendant que mon père et moi lui parlons de Parker et de Monk... Devant cette attitude insupportable, j’entraîne Marcel loin de ce pauvre type.

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